Henri Dunant (1828-1910) est un chef-d’œuvre de la pensée humaine. Condamné pour faillite frauduleuse, ruiné, déchu, poursuivi par pléthore de créanciers qui ne retrouveront jamais leurs mises, c’est la déchéance sociale, la solitude, la fuite ailleurs, la misère, le questionnement sur l’humanité ou pas de l’espèce dominante. De philanthrope à philosophe par nécessité de survie, de Solferino en touriste au prix Nobel de la Paix en 1901, la bienfaisance de sa maman dans le sang, Henry ne se pose pas de questions: les atrocités ont besoin d’action.
Compris ou pas compris, sa beauté d’esprit reste constante. Les guerres sont définitivement plus populaires que la paix, les souffrances sur les champs de bataille ignorées, les sorts funestes des soldats consentis, les maux des temps troublés multipliés à perpétuité. Henry Dunant, la Croix-Rouge que tu as inventée est une idée vertueuse et pertinente. Mais qui pour soutenir le génie de ta compassion, qui pour financer les blouses blanches aux brancards sur les théâtres d’opérations, qui pour dire bravo et merci? «Tutti fratelli», tous frères, tous médecins, tous infirmiers, tous infirmières: les cris d’agonie demandent de l’aide, pour vivre ou pour moins mal mourir.
Les événements d’hier se répètent aujourd’hui, sauf que les images choc qui passent à la télé nous montrent entre deux carcasses de tanks les ambulances blanches à croix rouge. Les enfants d’Henry Dunant font leur boulot. Les militaires hors de combat à cause des blessures cessent d’être des ennemis et sont considérés comme des êtres humains qui ont besoin d’aide et de secours. Les médecins, les brancardiers, les infirmiers, les infirmières peuvent donner leurs soins sans crainte d’être ciblés ou capturés. Ils ne sont pas forcés d’abandonner leurs blessés en cas de contre-offensive guerrière. A force de rigueur et de persistance, les bonnes pratiques de la Croix-Rouge sont définitivement imprimées et appliquées. Henry Dunant, tu as tout donné de ta vie et tu as réussi.
Texte et illustration: Pécub