Le verre occupe une place importante dans l’architecture contemporaine, recherché pour ses qualités esthétiques et l’apport de lumière naturelle qu’il procure. Les vitres fortement réfléchissantes protègent des rayons du soleil. Cependant, les oiseaux ont beau être parfaitement adaptés à l’environnement naturel, leurs capacités visuelles ne leur permettent pas de reconnaître le verre comme obstacle. Même si les chocs n’entraînent pas immédiatement la mort, les lésions internes ou la présence de prédateurs (chats par exemple) ne laissent généralement pas indemnes les malheureux volatiles. Presque toutes les espèces d’oiseaux sont concernées, y compris des espèces rares et menacées.
Le verre, reflet ou réalité?
Trois problèmes sont en cause. Il s’agit tout d’abord de la transparence: les oiseaux ne perçoivent pas le verre mais voient les arbres ou les buissons qui se trouvent derrière et s’y dirigent en ligne droite. Les situations particulièrement critiques sont les vitres d’angle (balcons, jardins d’hiver, fenêtres, etc.), ainsi que les surfaces en verre situées dans des endroits exposés (parois anti-bruit ou coupe-vent, passerelles, etc.). Les vitres et façades métalliques réfléchissantes constituent une seconde source de danger: les éléments naturels s’y reflètent, donnant l’illusion à l’oiseau d’un habitat accueillant. Enfin, lors de de mauvaises conditions météorologiques, les oiseaux migrateurs nocturnes sont attirés par les sources de lumière artificielle. Ils perdent l’orientation et entrent en collision avec les bâtiments. Les tours et gratte-ciels éclairés la nuit sont particulièrement dangereux.
«Le mieux est de prendre en compte le risque de chocs d’oiseaux avant la construction d’un bâtiment ou l’installation d’une paroi vitrée, insiste Patrick Jacot, président-fondateur du COR. Pour ce faire, on suivra les grands principes qui consistent à marquer les angles par des éléments voyants, à favoriser autant que possible les matériaux translucides (c’est-à-dire ceux qui laissent passer la lumière, mais ne sont pas transparents) et à privilégier les vitres avec un faible degré de réflexion externe (maximum 15%)». L’expert ornithologue recommande aussi d’éviter de planter des arbres ou des buissons à proximité de vitres réfléchissantes. La disposition de verres en retrait et les barrières métalliques constituent de bonnes alternatives. Enfin, il s’agira de réduire autant que possible la pollution lumineuse, en limitant l’éclairage extérieur et en le ciblant de haut en bas.
Mesures de protection ultérieures
Si le bâtiment est déjà construit et qu’il présente des sources de danger, on peut recourir aux marquages pour autant que l’on suive certaines règles: couverture de toute la surface sans laisser d’espaces plus grands qu’une paume de main, bon contraste avec l’arrière-fond et respect de certaines dimensions (largeur des lignes, trame de points, écarts, etc.). Le marquage est à poser si possible sur l’extérieur de la vitre; des bandes ou des films de bonne qualité sont à privilégier. A noter que les silhouettes de rapaces vendues dans le commerce sont inefficaces (noires, donc offrant peu de contraste et au recouvrement insuffisant). D’autres mesures sont à la portée de tous; ce sont les enseignes d’entreprises, voilages, rideaux, banderoles, dessins d’enfants ou décorations diverses, voyantes et bien réparties.
Quoi qu’il en soit, architectes et urbanistes ne peuvent plus faire l’impasse sur la protection de l’avifaune. La législation y veille déjà: ainsi, les murs antibruit doivent obligatoirement intégrer des marquages. La norme Minergie-Eco, quant à elle, stipule que «le risque de collisions avec les oiseaux doit être pris en compte et des mesures mises en place». Certains fabricants suisses ont compris l’enjeu, à l’instar de Glaströsch, qui propose les verres Silverstar BirdProtect. Imprimés avec des motifs de sérigraphie particuliers, ils sont visibles par les oiseaux de l’extérieur. Gardons l’espoir que nos villes deviennent un jour Bird Friendly!
Véronique Stein
Pour de plus amples renseignements, contactez le Centre Ornithologique de Réadaptation: Par tél. au 079 624 33 07, du lundi au samedi de 8 h à 18 h. – Ou par e-mail: secretariat@cor-ge.ch.
Voir la brochure «Les oiseaux, le verre et la lumière dans la construction»: Téléchargeable sur le site de la Station ornithologique suisse
www.vogelwarte.ch